Quand une paire de vieilles baskets botte les fesses du destin


Louis-sachar Le passage

Méfiez-vous.
Ce livre va vous donner envie de croquer des oignons crus.
De creuser des trous de 1 mètre 50 de diamètre et de profondeur.
D’escalader une montagne.
De respirer vos vieilles baskets.
De mettre du rouge à lèvres avant de partir à la poursuite de vos ennemis.
De tout savoir sur l’existence oubliée de votre arrière-arrière-arrière-grand-mère.
Et ce, même si vous haïssez les liliacées, même si vous détestez l’alpinisme et les travaux forcés, même si vous avez les cosmétiques en horreur autant que les odeurs de pieds, et même si la généalogie et les histoires de famille vous indifférent profondément.
Maintenant, pour échapper à tout cela, c’est simple. Il vous suffit de ne pas imiter les centaines de milliers d’adolescents américains qui ont déjà plébiscité ce livre, et de ne jamais l’ouvrir.

C’était la promesse donnée par le quatrième de couverture, et il faut avouer qu’elle est parfaitement respectée à l’issue de la lecture. Vous ne trouverez pas d’analyse dans cet article, je tenais à présenter ce livre qui trône fièrement dans ma bibliothèque depuis maintenant une dizaine d’années.

La construction du livre est plutôt atypique pour un livre visant un public adolescent, alternant intelligemment incursions dans le passé et retours dans le présent. Les phrases sont courtes, les chapitres également – 50 pour 267 pages – ce qui accentue la sensation d’un livre rythmé et dynamique.

Comme les jeunes du camp qui travaillent à un rythme soutenu, l’auteur ne laisse pas au lecteur le temps de souffler au détour d’une page et maintient son attention. Au fil du récit, les pièces du puzzle finissent par s’emboîter parfaitement, naturellement. Et ce alors même que les situations sont irréalistes et prétextes à sourire, comme le fait que le point de départ de toute l’histoire du héros est le vol d’une vieille paire de basket puantes ayant appartenu à un célèbre joueur de Baseball. Pourtant, tout élément qui paraissait incongru et faisait hausser un sourcil au lecteur – pourquoi me parle-t-on en long large et travers de confiture de pêche ? – trouve finalement sa place dans la trame narrative, parfois en de savoureuses préparations/paiements.

Ce livre est devenu un de mes livres « itinérants », qui se balade de mains en mains dans mon entourage depuis des années. Un des reproches récurrent envers ce livre est le malaise ressenti à la lecture de certaines situations. En effet, même si la situation se revèle particulièrement irréaliste, les thèmes abordés sont quant à eux bien réels, et l’éventail est étendu : racisme, maltraitance sur mineur, le travail forcé à la limite de l’esclavagisme…

Ces thèmes très durs sont néanmoins contrebalancés par un fil conducteur initiatique, où la solidarité, l’amitié, ou encore le courage permettent aux protagonistes d’amener le lecteur à se dire que lui aussi aimerait peut-être bien effectivement aller creuser quelques trous.


Louis Sachar – Le passage, Medium, 9.50€
Le passage a également été adapté en film, qui a reçu un bon accueil critique mais n’a pas été un succès commercial. 

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